Afrique de l’Est : une nouvelle frontière du pétrole et du gaz – Juin 2013

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L’Afrique de l’Est constitue un nouveau front pour le secteur des hydrocarbures. Les premières phases d’exploration ont souligné le potentiel important du Rift albertin aux confins de l’Ouganda, de la RDC et du Rwanda, une région qui a connu et connaît encore une forte instabilité politique. Le développement des réserves débute en Ouganda où la commercialisation est évoquée pour 2018.

Afin de caractériser cette nouvelle implantation, d’éclairer les opportunités et les contraintes d’un processus de mise en valeur, une perspective régionale à l’échelle de l’Afrique de l’Est ou de l’ « Afrique médiane », qui lui adjoint la région des Grands Lacs, suivant l’expression d’Yves Lacoste, est adoptée dans cet article. A l’échelle de la région, le Soudan est pionnier, puisque la production commerciale de pétrole a débuté en 1999. Depuis 2011, le Soudan du Sud a obtenu un statut indépendant et le contrôle des revenus liés à la production et au transport des hydrocarbures provoquent des crises à répétition avec le régime de Khartoum dont il s’est détaché. Plus au Sud, l’exploration bat son plein, mais la production de pétrole ou de gaz reste encore très limitée : Kenya, Tanzanie, Lac Tanganyika, littoral de l’Océan Indien. D’un point de vue géopolitique, à l’exemple du Lac Albert en Ouganda, la plupart de ces réserves d’hydrocarbures se situent dans les zones frontalières, suscitant des rivalités entre États dans la perspective de leur exploitation économique, créant un risque supplémentaire d’instabilité politique dans certains cas. La question des transports concernant les réserves enclavées se pose également, nécessitant des ententes entre États, dont la fédération est-africaine n’a pas encore pris pleinement la mesure.

Ces débuts d’une industrie des hydrocarbures dans l’Afrique médiane soulèvent des questions de gouvernance spécifiques : concernant la gestion de ce secteur et, également, plus généralement, concernant les systèmes politiques des pays concernés par cette nouvelle industrie dans leur ensemble. Ces régimes sont pour certains d’entre eux caractérisés de régimes « hybrides », autoritaires ou semi-autoritaires, avec forte personnalisation du pouvoir et présidentialisme. Il s’agit d’États pauvres mal armés pour se prémunir contre des accaparements de ressources, avec, en interne, peu de dispositifs assurant des contre-pouvoirs et ne présentant, sur un plan international, aucune garantie d’indépendance économique. Bien au contraire, cette nouvelle manne financière contribue à renforcer des logiques de pouvoirs non égalitaires et non démocratiques. Le cas de l’Ouganda est à cet égard illustratif de dérives possibles en dépit d’une mobilisation de l’opposition et d’organisations non gouvernementales. Le cadre juridique se met progressivement en place et pourrait servir d’exemple aux autres pays de la région. Cependant, le régime tente de centraliser au maximum la gestion du secteur pétrolier entre quelques mains à travers de nouvelles organisations de régulation qui lui seront inféodés.