Lire ou télécharger la note : Approche comparée de la RSS dans les Grands Lacs – Octobre 2013
Les programmes de réforme du secteur de la sécurité (RSS), actuellement en cours, concernent majoritairement l’Afrique : 12 sur 14 selon les Nations Unies. Deux se déploient encore dans les Grands Lacs en 2013. Conçue à l’origine par les organisations de la communauté internationale, la RSS fait maintenant l’objet d’une appropriation par l’Union africaine et les différents organismes de l’architecture de paix et de sécurité du Continent.
L’expérience empirique et les leçons apprises des programmes passés font l’objet d’un corpus doctrinal dense, mettant en avant les principes jugés indispensables pour la réussite de la RSS : celle-ci soutien le processus de paix et accompagne la sortie de conflit d’un pays : elle doit être globale et ne pas se limiter à l’armée et à la police ; son appropriation par les bénéficiaires est indispensable à la pérennité des réformes ; la coordination des initiatives des nombreux partenaires internationaux doit être assurée localement ; la première étape s’appuie sur un processus de désarmement, démobilisation, réinsertion (DDR) réussi, relayé par une réintégration dans le tissu économique et social des anciens-combattants.
En Afrique des Grands Lacs, le Multi-Country Demobilization and Reintegration Program (MDRP) a permis (entre 2002 et 2010) de gérer la démobilisation de près de 300 000 anciens combattants de 7 pays impliqués dans les guerres de la région. Il a été relayé depuis par un organisme de conseil, le Transitional Demobilization and Reintegration Program (TDRP). Une fois franchie l’étape de la DDR, les programmes de RSS ont pu être engagés au Burundi, au Rwanda, en République Démocratique du Congo (RDC). Si les deux premiers ont pu aboutir à des résultats, l’expérience a échoué en RDC.
Au Burundi, la RSS constitue le cœur des Accords d’Arusha, car elle implique une représentation équitable des communautés au sein des institutions de sécurité (armée, police et justice 60 % en faveur des Hutus, 40 % en faveur des Tutsis). Le processus a
progressé mais reste tributaire des tensions politiques. La question de la justice transitionnelle demeure pendante.
Au Rwanda, pays sorti vainqueur militairement des conflits des Grands Lacs, la RSS concerne principalement la police et la justice. Le gouvernement a piloté la réforme de telle manière que le maillage policier et judiciaire renforce désormais son contrôle sur la société.
En RDC, la RSS n’existe plus en tant que programme cohérent, en dépit de nombreux efforts. Le pays est encore en guerre. Le programme de DDR a subi les aléas des ralliements et des rébellions des groupes armés dans l’Est. Le gouvernement central n’entend retenir de la réforme militaire que des gains capacitaires immédiats pour les brigades nécessaires à la reconquête de l’Est. La police et la justice ne sont pas des priorités, l’insécurité interne qui en découle n’étant pas jugée comme une menace existentielle contre le régime.
In fine, contrairement à la crainte de nombreux auteurs, il y a bien eu « appropriation » de la RSS par les gouvernements locaux selon leur propre agenda. Mais celle-ci est quelle que peu différente de celle imaginée par les partenaires extérieurs.