Les armées ougandaises : un instrument de contrôle intérieur et de positionnement régional – Décembre 2014

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  • L’Uganda People’s Defence Force (UPDF) entretient des liens symbiotiques avec le parti au pouvoir du Président Museveni, le National Revolutionary Movement (NRM). Ceci s’explique par le passé de lutte commune ; l’UPDF étant l’héritière de la National Revolutionary Army (NRA) avec laquelle l’actuel président saisit le pouvoir en 1986.
  • Constituant le bras armé du nouveau régime dans une société segmentée entre le Nord et le Sud du pays, l’UPDF s’est engagée contre tous les ennemis de l’État NRM, qu’il s’agisse des rébellions du Nord et de l’Est du pays ou des États adversaires que sont le Soudan du Président El Bechir et la RDC de la dynastie Kabila. L’UPDF s’est progres­sivement transformée en une puissance militaire à vocation régionale, capable d’intervenir loin de ses bases, tout en mettant le régime ougandais à l’abri d’un renversement par les armes.
  • Toutefois, avec le changement de génération d’officiers et de cadres au sein de l’UPDF, se pose la question de la permanence de la fidélité au régime. En effet, les nouveaux venus n’ont pas connu l’épopée de la révolution ou la guerre avec la RDC. La transformation de l’ancienne guérilla révolutionnaire maoïste en une force interarmées capable d’assurer la défense des intérêts régionaux du pays implique des financements sur lesquels le régime ne peut faire l’impasse.
  • La fidélisation de l’institution militaire est engagée depuis 2004 avec le financement d’un « processus transformationnel » fondé sur une modernisation des équipements et une professionnalisation des personnels.
  • La modernisation est garantie par l’accès de l’UPDF aux ressources pétrolières et gazières en cours de développement, tandis que la professionnalisation est assurée par des « opérations de maintien de la paix » dirigées contre la LRA et les islamistes Shebabs, donc activement soutenue par des alliés extérieurs occidentaux.
  • En retour, l’accélération donnée aux activités d’extraction et d’exploitation pétrolière a entraîné une militarisation de certaines régions ougandaises en vue d’assurer leur sécurité (Lac Albert) ; donc raffermi encore plus le contrôle de l’UPDF sur le pays.
  • Au niveau régional, les nouvelles capacités aériennes et d’intervention ougandaises confèrent un leadership incontestable à Kampala dans les organisations régionales (IGAD et EASF) et en font un interlocuteur incontournable sur les questions de sécurité (soutien au Sud-Soudan du président KIIR). La nouvelle puissance militaire ougandaise contribue même à engager une course régionale aux armements avec le Soudan et commence à susciter la méfiance d’un pays allié comme le Kenya.

En conclusion, le NRM dispose d’une réelle garantie de longévité interne et le Président Museveni d’un prestige international qui le font courtiser par de nombreux pays émergents (Chine, Russie, Indonésie, Turquie, Corée du Nord) en mesure de remplacer une alliance avec les Occidentaux, le cas échéant. L’UPDF en tire un bénéfice direct avec des budgets de défense maintenus à 2% du PIBM et des ressources économiques profitables pour les cadres et la haute hiérarchie militaire.