Vie politique

Les notes sont présentées de la plus récente à la plus ancienne.

Après les élections tronquées de novembre 2011 : quelles perspectives pour la RDC ? – Juin 2012

Source : theguardian.comSource : theguardian.com

Lire ou télécharger la note : Après les élections tronquées de novembre 2011 : quelles perspectives pour la R.D.C. ? – Juin 2012

Le premier mandat de Joseph Kabila, qui devait être celui de la consolidation de la jeune démocratie congolaise, s’est manifestement inspiré du caractère autocratique des régimes précédents. Cette politique de repli démocratique a trouvé son expression «achevée» dans l’organisation et la gestion des élections présidentielles et parlementaires de novembre 2011. En effet, ces élections ont été jugées ouvertement frauduleuses et non crédibles par les différentes missions internationales d’observation électorale ainsi que par la mission d’observation de l’Église catholique.

La modification constitutionnelle de 2010, instituant notamment une élection présidentielle à un seul tour à la majorité simple, portait en germe un affaiblissement de la Présidence de la République, élément central du dispositif institutionnel hérité de la Constitution de 2006. Malgré les fraudes avérées, Joseph Kabila n’a finalement recueilli en 2011 que 49% des suffrages et se retrouve de fait dans la situation d’un Président minoritaire. De plus, la disparition d’Augustin Katumba Mwanke, son principal conseiller et proche depuis 2001, dans un accident d’avion survenu à Bukavu le 12 février 2012, est venu fragiliser encore un peu plus la position de Kabila qui est aujourd’hui regardé à l’intérieur du pays, mais aussi sur la scène internationale, comme un Président « mal élu » en quête de légitimité.

ŸL’exaspération sociale de la population congolaise s’ajoute aujourd’hui à la crise politique et institutionnelle issue des élections. En effet, particulièrement depuis 2010, la RDC a aligné les contre-performances économiques et sociales. Dans ce contexte d’empilement des crises, le risque d’embrasement semble croissant, en particulier dans les provinces déjà affectées par des révoltes armées ou celles qui sont traditionnellement enclines à la confrontation avec le pouvoir central (Bas-Congo et les Kasaï notamment).

Dans les provinces de l’Est, Ituri, Nord et Sud Kivu, où les rebellions n’ont jamais véritablement cessé leurs activités, l’hypothèse d’une aggravation de la situation politique et sécuritaire est encore plus probable. L’avenir de cette partie du pays s’avère extrêmement problématique à la lumière de trois facteurs principaux :

  1. L’approche de la fin du mandat des gouverneurs et des assemblées provinciales ;
  2. Les relations bilatérales ambiguës entretenues avec l’Ouganda et le Rwanda ;
  3. L’incapacité de Joseph Kabila et de ses gouvernements successifs depuis 2006 à régler la question des rebellions et de la restructuration des forces armées nationales.

ŸComme en 2007-2008, Joseph Kabila, incapable de faire face militairement à la mutinerie dans les Kivu, est contraint à la négociation avec Kigali qui, par son soutien ou sa condamnation de l’insurrection, semble détenir une nouvelle fois les clefs de la stabilité dans l’Est de la République Démocratique du Congo.

L’évolution du régime Museveni en Ouganda (1986-2012) – Juin 2012

Russell Watkins/Department for International DevelopmentRussell Watkins/Department for International Development

Lire ou télécharger la note en anglais : The Evolution of the Museveni Regime in Uganda (1986-2012) – Juin 2012

Il y a 27 ans, à la tête du Mouvement national de la résistance (NRM), le Président Yoweri Museveni a pris le pouvoir en Ouganda, renversant le gouvernement Obote après un combat de cinq ans (1981-1986). Le premier gouvernement Obote avait pris fin suite au coup d’état militaire du Général Idi Amin Dada en 1971. En 1980, Obote était revenu au pouvoir au travers d’élections que Museveni et ses alliés considéraient comme frauduleuses. Dans ce contexte, le NRM est arrivé au pouvoir en promettant un nouveau commencement, un complet revirement par rapport à la politique de sectarisme et d’exclusion, à la fraude électorale et à la manipulation d’un public ignorant des manœuvres de politiciens servant leurs propres intérêts. Le choix d’une politique inclusive s’est manifesté dans la décision de suspendre les partis politiques responsables de divisions et d’introduire l’idée de « politique sans partis », en invitant les membres d’organisations politiques rivales à participer au gouvernement. Par ce biais, durant les dix premières années du gouvernement Museveni, ce dernier parvint à unifier la plupart des régions du pays sur la base d’un vaste programme socio-économique de reconstruction. Bien que les revendications concernant le retour au multipartisme débutèrent mi-1990 et s’intensifièrent à la fin de la décennie, il fallut 20 ans pour briser le monopole de facto et de jure du NRM, au moins sur le plan juridique, grâce à la combinaison de pressions internes et externes. La décision de réintroduire les partis politiques fut prise au même moment que des manœuvres furent entreprises pour rendre la durée du mandat présidentiel illimité afin de permettre au Président Museveni de continuer à se présenter aux élections.

L’aboutissement de ces 20 années de suspension du multipartisme fut d’affaiblir les partis. Ainsi, lorsque les restrictions sur leurs activités furent levées en 2005, ces derniers n’étaient pas en mesure de concourir à égalité avec le NRM qui, sans compétition, était devenu hégémonique. En conséquence, le pays est passé de l’ère de la « politique sans partis », à une ère politique dominée par un seul parti. A l’heure actuelle, la confusion permanente entre parti et état a permis à ce parti de dominer à la fois au plan national et local. Le patronage constitue l’un des moyens utilisés pour conserver la suprématie de ce parti : l’accès au pouvoir, aux postes et à l’argent sont clés pour la mobilisation politique, le recrutement et la rétention de membres et de supporters. En outre, l’armée, prenant la suite du National Resistance Army (NRA) qui avait servi au NRM dans la prise de pouvoir, rebaptisée Uganda Peoples Defence Forces (UPDF), joue un rôle pivot. Aujourd’hui, bien que la participation des militaires à la politique soit formellement interdite puisque l’armée est un organe de l’état, l’armée a conservé beaucoup de son influence au travers du rôle individuel d’officiers – à commencer par le Président Museveni lui-même – qui interviennent de manière informelle et souvent sous des prétextes douteux en politique. De plus, afin de réduire l’écart entre l’UPDF et d’autres agences de sécurité telles que la police, des efforts ont été réalisés pour y infiltrer des officiers de l’armée et ces derniers ont progressivement occupés les positions clés tant au niveau local que national.

Après son accession au pouvoir, abandonnant très vite sa fascination pour le dirigisme économique, le NRM a cherché à faire ses preuves dans une politique en faveur de l’entreprenariat, en adoptant les politiques libérales du FMI et des programmes d’ajustements structurels de la banque mondiale. L’ouverture aux investissements étrangers a suivi avec en particulier le rappel des hommes d’affaire d’origine asiatique expulsés par Idi Amin.

La combinaison de tous ces facteurs explique les taux de croissance élevés depuis vingt ans, bien que les transformations structurelles de l’économie demeurent illusoires. La récente découverte du pétrole et sa mise en exploitation prévue constituent un changement, mais il est peu probable que le gouvernement soit capable de se débarrasser de ses attributs néo-patrimoniaux et d’utiliser la richesse produite par le pétrole pour le bénéfice de l’ensemble de ses citoyens.