Bateau sans boussole : le régime Kabila en perte de cohésion – Novembre 2014

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L’État congolais est d’une faiblesse légendaire : quelques jours après son indépendance mal préparée, le Congo est tombé dans une crise institutionnelle et constitutionnelle qui a mené le pays à sa première implosion. Plus tard, à l’époque du Président Mobutu, le degré de mauvaise gouvernance était tel que nous avons dû inventer des mots comme « kleptocratie » et auto-cannibalisme de l’État. Les institutions de l’État et les mandats publics étaient – et dans une large mesure, ils le sont encore – considérés comme des outils d’enrichissement personnel. Le résultat a été une crise de légitimité, un État en ruine, œuvrant en l’absence totale des instruments nécessaires pour imposer, maintenir et protéger l’État de droit. Après la fin de la Guerre froide, les différentes dynamiques en Afrique centrale ont mené la région à une avalanche de violence dans laquelle les antagonismes locaux ont été polarisés et entremêlés à ceux des pays voisins. Lors des deux guerres en République Démocratique du Congo (RDC), (1996-1997 et 1998-2002) qui suivirent le génocide au Rwanda, le Congo et plus particulièrement ses provinces de l’est devinrent le champ de bataille de « la Première Guerre Mondiale Africaine ».

Le processus de paix et les élections de 2006 ont créé le cadre de la Troisième République, mais ils n’ont pas permis à l’État congolais de renaître de ses cendres. Non seulement, l’État est resté faible, mais il a gardé sa nature fondamentalement prédatrice.

Aujourd’hui, la fragilité structurelle de l’État congolais reste la première cause d’insta­bilité. L’État continue à être géré selon un mode de gouvernance clientéliste, patrimonial et prédateur : « Il s’agit d’une gouvernance qui cannibalise littéralement les fonds publics, en grande partie détournés pour alimenter les différentes clientèles des hommes au pouvoir. Il vide les institutions de leur substance en favorisant l’établissement d’un gouvernement de l’ombre, quasi privatisé, où les décisions ne se prennent pas dans les cabinets des ministres compétents mais plus souvent dans les coulisses, entre les tenants « réels » du pouvoir et les membres influents de leur clientèle respective ». (Alex Bouvy, dans un rapport d’International Alert en 2012)